Cette salle de lecture en ligne propose un aperçu rétrospectif de la carrière de l'artiste Australienne Vee Speers au cours de ces vingt dernières années. Articulée autour de ses différentes séries, vous y trouverez des détails sur sa démarche, et ses procédés créatifs à travers vidéos, citations et anecdotes.
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" Je ne rentre pas vraiment dans la définition classique du photographe. J'utilise la photographie comme un outil pour racconter des histoires. Bien que mes images soient prises en studio et que les scènes créées de toutes pièces, je n'aime pas les émotions feintes de la part de mes modèles; je souhaite que mes images soient crédibles et évoquent des sentiments authentiques. Mon travail possède toujours une tension sous-jacente pouvant être délayée ou accentuée par mon approche esthétique."
Vee Speers
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Premières Oeuvres
2001 - 2004 -
BORDELLO
2001Vee Speers quitte l'Australie pour la France en 1990. Installée dans le quartier de Pigalle pendant dix ans, elle s'intéresse d'abord aux dernières maisons closes, où elle installe son studio pour créer la série "Bordello". Elle s'immerge dans la vie subversive et décadente du Paris du début du XXème siècle. Dans des décors opulents, elle mets en scène des nus séduisants et des portraits teintés de la noirceur de l'avant-guerre. S'inscrivant dans la ligne esthétique de Man Ray et Brassai, ses photographies offrent une exploration sensuelle de la forme féminine. Chaque image est produite selon le procédé Fresson. Les contours brumeux, les teintes charbonneuses des personnages en noir et blanc semblent se dissiper dans la nostalgie idéalisée des temps passés telle que l'envisage Vee Speers.
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" Le portraits crépusculaires des femmes par Vee Speers entraîne le spectateur au coeur de l'image pour entrer dans une vision rêvée d'une réalité souvent sordide. Les formes s'estompent, la perception laisse place à l'imagination. La vie réelle est abandonnée... Les frontières entre le sujet et la photographe se font de plus en plus fines. Vee Speers montre la beauté où celle-ci peut être terriblement absente."
Karl Lagerfeld
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PARISIANS
2004Alors qu'elle menait des recherches pour Bordello, Speers fit la connaissance dans le Paris alternatif, de personnages vivant en marge des conventions. Ces non-conformistes furent le point de départ à une série de portraits plus théatraux et fantaisistes intitulée "Parisians"." Chacun est unique, et je crois que ces différences devraient être célébrées. "
Vee Speers -
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THE BIRTHDAY PARTY
2007 -
Alors que Parisians consistaient à documenter ce que ses modèles lui donnaient à voir à travers leurs accoutrements et accessoires, The Birthday Party, débutée de façon concomitante, porte son attention sur l'externalisation du monde interieur de l'enfance. À travers le déguisement, ses modèles incluent des notions de performance et de jeu. Cette série de portraits intemporels offre une illustration riche et tangible des derniers paysages imaginaires de la jeunesse et de ses narratives inhérentes avant qu'ils ne soient balayés par l'adolescence.
The Birthday Party est l'une des séries les plus emblématiques de Vee Speers ainsi qu'une pierre angulaire de son oeuvres. Elle lui fut inspirée par sa fille benjamine et ses amis alors qu'elle avait tout juste 8 ans, mais aussi par sa propre enfance en Australie.
Elle marque le départ d'une trilogie comprenant Bulletproof et Dystopia.
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"Susan Bright, qui a rédigé l'introduction de mon livre, a sous-entendu qu'il s'agissait peut-être d'auto-portraits. Lorsque j'étais enfant, j'avais des fois envie de danser et faire des spectacles, alors que d'autres fois, je me sentais trop timide. Tout reposait sur mes émotions, et je suppose que mon expérience est semblable à celle des autres enfants. Des fois, nous nous sentons peu sûrs de nous et seuls, alors qu'à d'autres moments, nous nous sentons comme l'enfant le plus populaire de l'école. L'école, tout comme le fait de grandir dans une grande famille, peut se révéler être difficile. Il faut toujours être sur ses gardes. Je crois que The Birthday Party est d'abord à propos de moi, puis de mes enfants, et enfin des gens en général."
Vee Speers
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L'imagination prend son envol
Edward Kiersch, 2021C'est une forme de voyage unique. Un voyage depuis le pays de l'innocence et de la joie insouciante, vers des tourments souterrains de perplexité et d'appréhension. Une telle exploration demande un regard aiguisé et une sensibilité exacerbée car Birthday Party (2007) est semblable à un tableau expressionniste: une toile révélant des vagues de doutes melées à des envolées d'imagination juvénile.
Ce n'est pas une célébration ordinaire mais une parade Sturm und Drang, un désordre de jeunes filles aux visages moroses, bas résilles, armées jusqu'aux dents, et portant des animaux morts. De jeunes garçons portant des masques à gaz sont prêts à se battre avec une futur incertain. Ces enfants de 8 ans, le torse nu, tentant de projeter un air de défiance, sont le reflet d'une dystopie. Ils ont été trahis, invités d'une fête qui se devait être joyeuse. Ici, il ne reste plus que la certitude que ces célébrants se trouvent à la fin de l'enfance. Qu'ils se trouvent au bord d'un précipice périlleux, sur le point d'être confrontés à un monde défiguré penchant vers le morne et le bizarre.
L'espoir de la jeunesse se montrera palpable, résilient et puissant. Comme un phoenix, ces jeunes voleront, attraperont leur moment en leur temps, et dévoileront des qualités qui les rendront inaltérables.
Comment pourraient-ils découvrir la confiance et la magie, naviguer entre les spectres d'un monde bouleversé, parsemé de rats morts et baigné d'une inquiétante grisaille?
Impeccablement irréel, érudit et toujours provoquant, l'oeuvre de la photographe Parisienne Vee Speers sonde, interpelle et subverti avec son questionnement incisif et débridé.
Guidée par une perfection pénétrante (les couches de maquillage, les perruques, les costumes des années 1960 portés par ses enfants rats aux visages masqués), Speers nous emporte dans un royaume de contrastes, de contradictions et de conflits, où la réalité changeante et kaléidoscopique du grotesque côtoie le lyrisme et la beauté.
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Une image emblématique
" Il s'agit de la seule image de la série que j'avais esquissé au préalable, et le résultat est exactement tel que je l'avais imaginé. J'ai récupéré le costume d'un spectacle de danse qu'elle [la fille de l'artiste ] avait donné à l'école: une sorte de jupe tournante. Je souhaitais aussi un gros chignon à la Marge Simpson, quelque-chose de très exagéré qui fasse écho au cercle du ballon. Un coiffeur m'a aidé à la mettre en forme. Il a gonflé un ballon de baudruche et a collé des cheveux de couleur identique dessus, comme sur du papier mâché. Nous avons ensuite enroulé ses cheveux à elle autour du ballon et l'avons positionné sur sa tête. Ce fut la partie difficile car nous devions le fixer dans la bonne position et elle devait tendre son cou en avant. Cette position était assez incomfortable et j'ai donc du faire vite : je voulais que la photo soit prise en cinq minutes. Elle n'a que neuf ans."
Extrait de The Guardian -
THIRTEEN
2012 -
À la suite de The Birthday Party, Vee Speers s'intéressa aux transformations vécues par sa fille à l'âge de 13 ans. Quittant l'enfance, elle exprima son désir d'indépendance à travers un choix d'accessoires et accoutrements symboliques. Qu'elle déploie ses ailes en plumes, porte une couronne d'orchidées en fleurs, laisse traîner des bandages, se meuve en Léda ou chuchote à l'oreille des corbeaux, sa fille est dépeinte dans un état transitionnel, domptant ses peurs et embrassant le futur.
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BULLETPROOF
2013 -
Six ans après The Birthday Party, Vee Speers a demandé aux mêmes enfants de poser une fois encore devant son objectif alors qu'ils se transformaient et faisaient face aux défis de l'adolescence.
Encore imprégnés de la fantaisie de l'enfance, l'innocence et l'espièglerie de ses modèles s'évapore doucement. Leur imaginaire devient aride, dystopique, et fait appel à leurs instincts de survie. Ils deviennent les héros d'une histoire mélant Le Seigneur des Mouches aux garçons perdus de Peter Pan; ils se métamorphosent en gladiateurs, en guerriers steampunks et en survivants masqués issus de contes anciens. Malgré ces nouveaux défis, ils semblent former une armée invincible.
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DYSTOPIA
2017 -
Vee Speers, Untitled #16, 2017
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Pour le dernier volet de sa trilogie, Speers invente sa propre dystopie. Elle y dépeint l'image d'un monde déstabilisé où, bien que le soleil soit froid et la peur omniprésente, règne une grande liberté. Les craintes et peurs, telles des flèches, percent les corps de ces jeunes et puissants héros. Il n'existe pas d'identité fixe, de genre déterminé; les charactères sont des héros, des shamans, des combattants semblant invincibles. Ils semblent tout droit sortis d'une folie, d'un cirque ou d'un poème d'un passé lointan ou d'un futur de science-fiction.
Peut-être proviennent-ils d'une nouvelle mythologie, de Mad Max ou d'un film de Tim Burton. Cette série clôt le cycle d'une histoire débutée dix ans plus tôt. Une histoire démarrée avec les photos d'enfants dans The Birthday Party, puis six ans plus tard ces mêmes modèles à l'adolescence avec Bulletproof. Dystopia apporte une conclusion à cette belle histoire.
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BOTANICA
2016 -
Depuis ses premières occurences à but documentaire avec Henry Fox Talbot ou Karl Blossfeldt, jusqu'au XXème siècle où son dévelopement établit de nouveaux parallèles avec la forme humaine, le thème floral suit un fil ininterrompu dans l'histoire de la photographie. Avec Botanica, Vee Speers explore ce genre selon les mêmes codes appliqués à ses portraits humains: elle shoot en noir et blanc devant un fond neutre, et ajoute des couleurs en post-production selon son propre ressenti. Faisant usage d'une palette éthérée, chaque image est un distant souvenir d'une réalité fabriquée dans un jardin secret onirique, telle une invitation dans le havre de paix personnel de l'artiste.
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Vee SpeersBotanica #12 (Tulipa Gesneriana), 2016
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Vee SpeersBotanica #13 (Heliconia Bihai), 2016
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Vee SpeersBotanica #16 (Paeonia), 2016
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Vee SpeersBotanica #17 (Protea Cynaroides), 2016
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Vee SpeersBotanica #18 (Tulipa Gesneriana), 2016
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Vee SpeersBotanica #19 (Craspedia), 2016
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Vee SpeersBotanica #21 (Iris Germanica), 2016
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Vee SpeersBotanica #22 (Pennisetum), 2016
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PHOENIX
2020 -
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TRANSCENDENCE
2024 -
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Vee Speers
Globe, 2023C-type print
90 x 90 cm
35 3/8 x 35 3/8 in
Edition of 5 plus 2 artist's proofs -
Vee Speers
Gaia, 2023C-type print
120 x 120 cm
47 1/4 x 47 1/4 in
Edition of 4 plus 2 artist's proofs -
Vee Speers
Orchids, 2023C-type print
120 x 120 cm
47 1/4 x 47 1/4 in
Edition of 4 plus 2 artist's proofs -
Vee Speers
Crown, 2023C-type print
120 x 120 cm
47 1/4 x 47 1/4 in
Edition of 4 plus 2 artist's proofs
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This young embodies youth and our future. He is looking down, his gaze heavy with preoccupation. He is crowned by what can be perceived as Christic allusion with prickly thistles replacing dried thorny branches. While Speers shares her concerns for the future of our planet, the choice of green and blue flowers in full bloom, infused with life and hope, suggests a positive alternative.